Chapitre : L’évaluation des salariés

I- L’évaluation au centre des pratiques de GRH :
         L’évaluation des salariés occupe une place centrale dans les dispositifs de mobilisation des hommes. Le retour qu’elle permet de mettre en place sur l’activité des individus est indispensable au renforcement de l’implication.
         Par ailleurs, elle permet de donner une cohérence aux décisions de rémunération, de promotion ou encore de formation qui pa rticipent pour beaucoup à l’entretien de la motivation.
         L’évaluation soulève pourtant autant de questions qu’elle apporte de réponses : définir la valeur d’un salarié n’est en effet pas facile. Cette question pose le problème des critères retenus et de la personne qui émet le jugement.

1-  Les critères de l’évaluation : la place des conventions
         Au centre de l’analyse des pratiques d’évaluation se situe la question des critères pertinents pour la conduire.

·     On peut se reposer sur des critères de performance : est « bon » celui qui atteint les résultats escomptés.

·     On peut mettre l’accent sur le potentiel et insister sur les capacités futures. L’expérience, la détention d’un « métier » peuvent ainsi être des indices d’un potentiel.

·     On peut définir la qualité en référence au jugement porté par le marché du travail: les collaborateurs de valeur sont ceux qui sont les plus chers sur le marché (poids des diplômes par exemple).

On peut mettre en avant la qualité des relations personnelles : un collaborateur de valeur est quelqu’un en qui on peut avoir confiance, qui se comporte en collègue agréable, qui respecte les traditions…
Ces distinctions posent enfin le problème des finalités de l’évaluation : évalue-t-on pour recruter, pour former, pour rémunérer, pour promouvoir ?...

2-  La multiplicité des acteurs de l’évaluation :
         Les critères peuvent varier selon la position de celui qui évalue : les pairs, les collègues avec qui le salarié va travailler peuvent insister sur la personnalité de l’individu, le responsable hiérarchique sur la performance immédiate, le responsable RH sur le potentiel…
         En effet, on pourrait penser hâtivement que l’évaluation est le fait de la ligne hiérarchique ou des professionnels de la GRH. Pour autant, de façon très claire, l’évaluation est également le fait des clients ou encore des partenaires de l’entreprise.

         Que le processus d’évaluation soit formalisé ou non, le travail s’effectue toujours sous le regard de quelqu’un en situation de porter un jugement. La multiplication des acteurs de l’évaluation peut permettre aux individus de jouer les évaluateurs les uns contre les autres pour se ménager des marges de manœuvre ou pour consolider une légitimité.
Le but d’une bonne politique d’évaluation est de parvenir à concilier ces différents critères en fonction des finalités de l’évaluation utiles à l’organisation. L’évaluation doit en effet orienter le collaborateur vers les comportements qui sont attendus de lui et permettre de prendre les décisions le concernant de la façon la plus efficace possible. Si l’on adopte le seul point de vue de l’employeur, le système d’évaluation doit permettre d’évaluer la performance immédiate pour prendre des décisions de rémunération variable et d’évaluer les compétences pour penser l’évolution professionnelle et planifier un effort de formation.

II- Les outils de l’évaluation :

         L’outil phare de l’évaluation est l’entretien périodique formalisé avec le responsable hiérarchique. Pourtant, d’autres formes d’évaluation existent qui laissent moins de place à cet acteur.
1- L’entretien d’évaluation :
         L’entretien d’évaluation est une pratique qui consiste à instaurer et à formaliser une discussion entre supérieur hiérarchique et collaborateur, au sujet des performances, des lacunes et des perspectives de ce dernier. Lorsque l’entretien n’est pas formalisé, ces discussions n’ont souvent pas lieu, faute de temps ou alors en cas de conflit, ce qui n’est pas souhaitable. L’intérêt de l’entretien formalisé est qu’il débouche sur la rédaction d’un document qui peut ensuite être exploité par des tiers (les professionnels RH) pour préparer des décisions : plan de formation, décision relatives à la rémunération, etc.
Le processus se déroule de façon suivante :
·     Une grille d’entretien est préparée par la DRH. Elle reprend l’ensemble des dimensions qui doivent faire l’objet d’une discussion. Ce document doit faire figurer explicitement les critères d’évaluation en fonction des différentes décisions qui seront prises sur la base de l’entretien.

·     Le collaborateur et le supérieur hiérarchique préparent l’entretien en amont sur la base de la grille et, le cas échéant, du document établi à la suite de l’entretien précédent.

·     L’entretien à proprement parler est effectué. On veillera à ce que ce moment reçoive l’attention qu’il mérite (salle isolée et calme, pas d’interruption, durée suffisante…).

·     Les protagonistes parviennent à un accord sur les différentes dimensions à évaluer. Si ce n’est pas le cas, la procédure peut prévoir l’arbitrage d’un tiers (le N+2 généralement).

Par la seule discussion qu’il instaure l’entretien peut se révéler bénéfice. Pourtant, la pratique de l’entretien d’évaluation peine souvent à se généraliser dans les entreprises.
         en effet, « se dire les choses » n’est pas toujours dans la culture des personnes concernées et les entretiens ne débouchent parfois sur aucune décision concrète.
         Par ailleurs, à raison d’une à deux heures d’entretien par salarié, les responsables hiérarchiques n’ont souvent pas les moyens d’y consacrer le temps nécessaires.
         Enfin, on notera que toute situation d’évaluation en face à face recède une part de négociation. D’une part, la discussion amène en effet à clarifier les critères légitimes pour exercer le jugement. C’est notamment le cas lorsqu’il s’agit de discuter des objectifs à atteindre. D’autre part, l’évaluateur peut lui-même être amené à des concessions dans la mesure où il est potentiellement lui aussi responsable des performances atteintes par l’évalué (s’il ne lui a pas donné les moyens d’atteindre ses résultats par exemple). Il doit enfin tenir compte de son éventuel ‘pouvoir de naissance ».
         Pour ces raisons, on déplore souvent que les entretiens ne soient que des rituels sans portée autre que symbolique.

2- Les autres formes d’évaluation :
         Il peut arriver que le supérieur hiérarchique ne soit pas le mieux placé pour évaluer le collaborateur. Dans ce cas, d’autres formules peuvent se substituer à l’entretien ou le compléter.

·    

Evaluation des compétences et des potentiels : le supérieur hiérarchique peut ne pas être mesure de juger de la conformité des compétences détenues par le collaborateur. On pourra alors mettre le collaborateur en situation de travail et le faire observer par des professionnels de l’évaluation ou des pairs. C’est d’une certaine manière la logique qui prévaut dans les examens et concours propres à la fonction publique ou encore dans les assessment centres.

·     Pour certains collaborateurs les entreprises peuvent pratiquer des évaluations dites « à 360° ». Il s’agit de faire évaluer l’individu par une dizaine de personnes : des responsables hiérarchiques, des pairs, des subordonnés, des clients… On obtient ainsi un panorama complet des compétences, performances et éventuellement lacunes de l’individu dans l’ensemble des domaines de son activité : est-ce un bon manager ? un collaborateur performant ? un collègue fiable ?... Cette pratique, très intéressante sur le principe, pose toutefois plusieurs problèmes : elle coûte cher et pose le problème de la confidentialité des évaluations.

·     Dans de nombreux cas, les professionnels s’entendent entre eux pour évaluer leurs pratiques respectives et leurs besoins de formation. L’objectif est de préserver l’éthique professionnelle des contraintes de la production ou des intérêts parfois envahissants de l’entreprise. Plus largement, de nombreuses entreprises mettent en place des comités d’éthique ou de déontologie pour éviter les dérives liées à une évaluation portée par la seule ligne hiérarchique.

·     L’évaluation peut ne reposer que sur des critères de productivité comme le volume de vente pour les commerciaux, le nombre de publications pour des chercheurs, la satisfaction des clients. Le collaborateur reste libre de la façon de les atteindre et l’on ne se soucie que de mesurer ce qui est produit. De plus en plus, ces pratiques d’évaluation se formalisent : enquête de satisfaction client, traçabilité de l’activité…

·     Enfin, dans la majorité des organisations, notamment de petite taille, l’évaluation reste un processus très informel qui passe par la proximité entre manager et subordonné et l’exercice répété sur une base quotidienne des appréciations et  retours variés. La GRH y étant souvent peu formalisée et les critères restant implicites, l’évaluation reste à cette image.

3- L’évaluation est un discours

         On le voit, il y a autant de façon d’évaluer les collaborateurs qu’il y a de critères de performances et de modalités du lien social dans l’entreprise. Au-delà de cette variété, l’évaluation a pour finalité de permettre la mise en cohérence de décisions concernant les personnes, mais elle constitue également un discours sur ce que l’organisation estime être la performance. En cela, les pratiques d’évaluation quelle qu’elles soient constituent une façon de véhiculer et de renforcer les normes comportementales dans l’entreprise. L’évaluation est un des dispositifs de la socialisation dans l’organisation c’est-à-dire de l’apprentissage des rôles attendus.
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