Chapitre : La politique de prix

1- Généralités :
         Le prix est l’expression monétaire de la valeur d’un produit. Il possède, au sein des variables du mix, une importance particulière car il est source de revenus pour l’entreprise. Il est en outre aisément modifiable, à la différence des décisions en matière de produit ou de distribution qui se situent sur le moyen ou le long terme.

A- Définition et objectifs de la politique de prix :

Juridiquement, le prix se définit comme la somme d’argent que l’un des contractants doit payer à l’autre en contrepartie d’un bien ou d’un service.
A NOTER  * Tous les contrats ne donnent pas nécessairement lieu à un prix, par exemple un don, du troc, des cadeaux lors d’actions promotionnelles, des journaux gratuits…
La politique de prix consiste à déterminer les prix auxquels une entreprise vendra chacun de ses produits à chacun de ses clients. Il faut alors distinguer deux situations :
- l’entreprise fixe les prix de vente que paieront les acheteurs finals : c’est le cas de la vente directe (l’entreprise fixe alors les PVC, prix de vente consommateurs) ou lorsque l’entreprise peut imposer à ses distributeurs un prix final. Dans ce dernier cas, le producteur fixe à la fois le prix de vente distributeur et le PVC, et fixe aussi de fait les marges du distributeur (cas de constructeurs automobiles vis-à-vis de leur réseau exclusif par exemple) ;
- l’entreprise négocie le prix de vente aux distributeurs, ces derniers fixent ensuite leur marge et appliquent un prix de vente au consommateur final.

Exemple :
         Une même mayonnaise vendue 1 dh à la centrale d’achat Leclerc et celle de Carrefour pourra se retrouve à 1,05 dh chez Leclerc si ce dernier se sert de ce produit comme produit d’appel et à 1,40 dh chez Carrefour si ce dernier cherche à obtenir des marges importantes sur ce produit.
Les objectifs de la politique de prix peuvent être très variés. On peut en distinguer quatre :
- Objectif de volume : il s’agit de pratiquer un prix suffisamment bas pour faire augmenter la part de marché, l’hypothèse étant qu’un volume de vente élevé entraîne des coûts réduits (économies d’échelles) et donc des profits plus importants ;
- Objectif de rentabilité : la maximisation du profit est l’un des objectifs les plus fréquents. A partir d’une courbe de coûts et d’une courbe de demande, on fixe un prix maximisant le profit. En réalité, les courbes sont difficiles à évaluer et on ne tient pas compte de la concurrence ;
- Objectif d’image : certaines entreprises souhaitent apparaître comme des leaders en termes de qualité. Comme des prix élevés sont souvent associés à une qualité élevée, l’entreprise va fixer des prix élevés dans le but de s’assurer une bonne image. D’autres recherchent à l’inverse une image de prix bas ;
- Objectifs « sociaux » : certaines organisations (associations par exemple) peuvent pratiquer un prix coûtant, voire inférieur au coût de revient (grâce à des subventions), dans le but de faciliter l’accès au produit par les plus démunis.

B- La règlementation des prix :
         Avant 1986, la France vit sous un régime de contrôle des prix : toute entreprise doit faire une demande au ministère de l’économie afin d’obtenir une autorisation d’augmenter ses prix. Le principe de liberté de fixation des prix par les producteurs et les distributeurs a été établi par l’ordonnance du 1er décembre 1986.
A NOTER  * Ordonnance du 1er décembre 1986, 1er alinéa : « Les prix des biens, produits et services (…) sont librement déterminés par le jeu de la concurrence ».
Il existe cependant des restrictions ou des exceptions à ce principe :
- dans certains secteurs, les prix sont contrôlés par les pouvoirs publics : EDF ou GDF demandent par exemple une autorisation de hausse des prix à l’Etat ;
- il existe des restrictions à la liberté des distributeurs en matière de marges : interdiction de la revente à  perte (en dessous du prix d’achat au producteur, à l’exclusion de toute ristourne), interdiction des prix abusivement bas (prix exigés par des distributeurs à leurs sous-traitants), interdiction de rabais trop élevés (dans le secteur du livre, la loi Lang interdit des rabais supérieurs à 5 % sur les prix recommandés par les éditeurs) ;
- la loi exige la transparence des prix et interdit les pratiques discriminatoires : obligation st faite aux distributeurs d’indiquer clairement le prix d’un article (pour certains produits, la provenance doit aussi être mentionnée : viandes, fruits et légumes), le barème de prix et les conditions de revente de tout producteur doivent être accessibles (afin d’empêcher des prix discriminatoires).
Les prix sont donc fixés librement sous réserve de se conformer au droit de la concurrence. Ce dernier interdit :
- les atteintes au nom commercial ou à la propriété industrielle, notamment la marque ;
- le détournement de clientèle (par le dénigrement, la publicité comparative non objective, les packagings introduisant une confusion sur l’entreprise par exemple). Il s’agit de ce que l’on nomme habituellement la concurrence déloyale.
- les pratiques anticoncurrentielles : il s’agit des clauses de non-concurrence abusives (pour être valable, une clause de non-concurrence, l’interdiction pour un vendeur de s’installer trop près de son ancienne implantation par exemple, doit présente un intérêt pour le bénéficiaire et ne pas supprimer sa liberté d’action) et du refus de contracter (le refus de ventes est interdit sauf si le client n’est pas solvable, a une réputation douteuse ou une demande anormale) ;
- les ententes et les abus de position dominante : les ententes sont interdites si elles aboutissent à se partager le marché ou à vendre au même prix, entravent ou suppriment le libre jeu de la concurrence. Ces pratiques sont portées devant le Conseil de la Concurrence en France ou la Commission de Bruxelles au niveau Européen.

2- Les modes de fixation du prix:
         Une entreprise fixe le prix d’un produit au moment de son lancement, puis elle est amenée à le modifier de nombreuses fois tout au long de la durée de vie du produit.

A- La fixation des prix par les coûts :
         La méthode la plus simple consiste à fixer le prix en ajoutant au coût total du produit un taux de marge défini à l’avance. Ce dernier est très variable selon le secteur d’activité et à l’intérieur de celui-ci : les produits pharmaceutiques, les produits cosmétiques ou de luxe perçoivent des marges très élevées ; les automobiles ont le plus souvent des marges bien plus faibles, et très variables selon les modèles ; enfin, in produit d’appel aura une marge proche de 0.

Exemple :
         Un fabricant d’ours en peluche possède les caractéristiques suivantes : des coûts variables (proportionnels aux volumes) de 2 dh par peluche, des coûts fixes (indépendants des volumes) s’élevant à 600 000 dh et des ventes prévisionnelles évaluées à 150 000 unités. Le coût à l’unité d’une peluche (CU) est égale à son coût variable (CV) auquel on ajoute le coût fixe (CF) divisé par les ventes prévues (V), soit ici : CU = 2 + (600 000 / 150 000) = 6 dh.
Si l’entreprise fixe sa marge à 20 %, elle adoptera le prix suivant :
p = CU / (1 – taux de marge) = 6 / (1 – 0,2) = 7,50 dh.
A NOTER  * Les entreprises de distribution sont les plus nombreuses à adopter cette  démarche qui est relativement aisée pour elles : le coût unitaire du produit est connu, c’est le prix payé au producteur ! Pour les producteurs en revanche, ce calcul reste tout théorique, les coûts étant difficiles à évaluer parfaitement, ces derniers dépendant des volumes de vente… Or les volumes de vente sont aussi très difficiles à estimer.
Cette méthode utilisée seule (sans tenir compte de la demande ou de la concurrence) ne peut pas conduire à un prix maximisant la rentabilité. Elle est même clairement erronée lorsque les ventes réelles s’éloignent des anticipations. Cependant c’est une pratique très courante car :
- les coûts sont généralement plus aisés à estimer que la demande ;
- si tous les concurrents adoptent cette méthode on évite généralement une guerre des prix toujours très coûteuse.

         Une autre méthode fondée sur les coûts consiste à déterminer le prix qui permet d’obtenir un taux de rentabilité donné, compte tenu du volume de vente attendu.

Exemple :
         Pour lancer son activité, notre fabricant d’ours en peluche a investi 2 000 000 dh (I) et il souhaite obtenir un taux de rentabilité (ou taux de retour sur investissement, ROI) de 15 %, soit 300 000 dh. Le prix et alors fixé de la façon suivante :
p = CU + [ (ROI x I) / V] = 6 + [ (0,15 x 2 000 000) / 150 000] = 8 dh.
Problème: on n’est jamais sûr  de vendre 150 000 unités pour ce prix…
Il faut donc toujours calculer le point mort, c’est-à-dire le volume de vente à partir duquel le produit, pour un coût donné, devient rentable.
Point more = CF / (p – CV) = 600 000 / (8 – 2) = 100 000
         Le point mort est atteint pour un volume de 100 000 ours en peluche. En dessous de ce seuil, l’entreprise perd de l’argent. Au-dessus l’activité est rentable.

         La fixation d’un prix en fonction d’un objectif de rentabilité pose cependant un problème non négligeable : au départ, c’est une estimation du volume de vente qui a permis de calculer le prix ; or le prix influence à l’évidence le volume de vente… Cette tautologie tient à l’ignorance, à ce stade, de l’élasticité de la demande et des prix des concurrents, que nous allons voir à présent.
B- La fixation des prix par la demande :
         Une autre manière de fixer les prix des produits consiste à analyser les attitudes des clients potentiels à l’égard du prix. Il s’agit d’estimer le prix jugé acceptable par le plus grand nombre de clients potentiels. Cela équivaut aussi à mesurer la valeur perçue du produit par les clients potentiels.
Les origines du marketing
Les chercheurs américains Gabor et Granger ont été les premiers, dès 1961, à étudier la mémorisation des prix par les consommateurs. Quarante années de recherche sur le prix ont permis d’établir que l’acheteur juge les prix par comparaison avec un prix de référence qui peut être interne ou externe : le prix de référence interne est issu de la mémoire du consommateur (il se souvient du dernier prix payé pour un produit similaire ou est capable d’évaluer un prix moyen pour la catégorie de produit) alors que le prix de référence externe provient des publicités ou de l’observation des prix sur le lieu de vente. Il est intéressant de noter que les consommateurs ont en général une faible mémorisation des prix (environ 40 % des consommateurs seulement mémorisent un prix), que celle-ci est peu précise (erreur de 10 à 30 %), différente selon les produits (plus élevée pour les produits achetés fréquemment) et variable selon le statut social (Desmet et Zollinger, 1997).
1) L’élasticité prix de la demande :
         La première méthode consiste à déterminer la courbe d’élasticité de la demande au prix. Elle correspond à la variation de la demande (D) provoquée par une hausse (ou une baise) de 1 % du prix (p), soit : e = [(DD/D) / (DP/P)].

Exemple :
         Au prix de 8 dh, un ours en peluche se vend à 12 000 unités. Au prix de 9 dh, ses ventes passent à 9 000 unités. L’élasticité de la demande (entre 8 dh et 9 dh) est donc de :
e = [(9 000 – 12 000) / 12 000] / [(9 – 8) / 8] = - 0,25 / 0,125 = -2
         La hausse du prix de 12,5 % provoque une baisse de la demande de 25 %, soit un facteur 2 (une hausse du prix de 1 % provoque une baisse de la demande de 2 %).
         Généralement, l’élasticité prix de la demande est négative (une hausse du prix engendre une baisse de la demande). La demande est parfois inélastique, l’élasticité étant alors nulle (exemple de l’essence), plus rarement l’élasticité est positive (par un effet d’image ou dans le cas d’un produit favorisé par le distributeur car il lui rapporte davantage).
         La question de la fixation des prix serait fortement simplifiée si l’entreprise pouvait établir la courbe d’élasticité de la demande d’un produit par rapport à son prix puisqu’elle serait alors capable d’envisager le volume de ses ventes pour tous les prix. Ce n’est évidemment pas le cas. Dans la pratique, les entreprises essaient d’estimer approximativement quel serait le volume des ventes pour un ou plusieurs prix possibles, et ce par plusieurs méthodes :
- L’analyse des ventes passées : ces analyses statistiques sont très utilisées (panels), mais ne garantissent en rien l’exactitude des résultats car le passé ne permet que rarement de prévoir le futur et, en outre, il est difficile d’isoler l’effet du prix sur les autres variables ;
- les enquêtes : méthodes directes (on demande si l’enquêté achèterait à un prix A, puis B…) ou indirectes (on demande à l’enquête  son prix maximum et son prix minimum).

2) La valeur perçue :
         D’autres méthodes  consistent à mesurer la valeur perçue en interrogeant les consommateurs sur la valeur qu’ils attachent au produit. Trois techniques sont utilisées en pratique :
- la méthode d’évaluation : le client potentiel fixe un prix qui correspond à la valeur qu’il attribue au produit ;
- la méthode des sommes constantes : le client potentiel répartit un nombre fixe de points entre plusieurs produits concurrents en fonction de la valeur qu’il attribue à chacun ;
- la méthode des attributs : le client potentiel distribue un nombre fixe de points entre plusieurs attributs du produit pour déterminer leur importance, puis répartit à nouveau ce même nombre de points pour chaque attribut entre différents produits concurrents. L’entreprise peut ensuite aisément calculer la valeur perçue de chaque produit en multipliant les scores obtenus pour chaque produit par les notes d’importance des attributs ce qui lui permet in fine de calculer le prix de son produit en fonction de la valeur perçue des différents produits concurrents.

Exemple :
         On demande à des consommateurs de répartir 100 points entre trois produits pour chacun des trois attributs. On leur demande ensuite de répartir 100 points pour déterminer l’importance qu’ils accordent aux trois attributs. Dans le tableau suivant, on observe que le produit X possède une valeur perçue supérieure à celle de ses concurrents. La société X peut donc se permettre d’adopter un prix plus élevé.

Score d’importance
Attribut
Produit X
Produit Y
Produit Z
40
35
25
Goût 
Taux de sucre
Forme
50
50
30
30
40
50
20
10
20
100
Valeur perçue
4 500
3 850
1 650

Par exemple, si Y a un prix de 20 dh, l’entreprise X peut fixer le prix de son produit à : p = (20 x 4 500) / 3 850 = 23,38 dh.

3- Le prix d’acceptabilité :
         Enfin, la méthode la plus utilisée consiste à établir le prix d’acceptabilité d’un produit par les clients potentiels : les clients évaluent la valeur qu’ils sont disposés à payer pour un produit et le prix d’acceptabilité correspond au plus grand nombre d’acheteurs potentiels pour ce prix.
A NOTER  * Le prix d’acceptabilité est parfois aussi nommé prix psychologique, en référence à l’étude de la psychologie des consommateurs qui permet de le déterminer. Cependant, la notion de prix psychologique devrait plutôt être utilisée pour nommer des prix non arrondis.
Méthode
Etape 1 : Il s’agit d’interroger un échantillon représentatif de la cible, deux questions leur étant posées afin d’évaluer la fourchette de prix acceptable pour chacun.
1-    A partir de quel prix ce produit est-il cher pour vous ?
2-    En dessous de quel prix ce produit n’est-il pas assez cher pour vous ? (ou encore : en dessous de quel prix auriez-vous peur que sa qualité soit insuffisante ?).

Etape 2 : Les réponses sont rassemblées et mises sous la forme de fréquences.

Prix
Question 1
Question 2
Fréquences
Question 1
Fréquences
Question 2
100
0
60
0 %
15 %
110
24
80
6 %
20 %
120
16
120
4 %
30 %
130
180
80
45 %
20 %
140
100
60
25 %
15 %
150
80
0
20 %
0 %

400
400
100 %
100 %
         Explication de la ligne 2 : sur les 400 personnes interrogées, 24 estiment que 110 dh représente un prix excessif et 80 jugent que c’est un prix insuffisant.

Etape 3 : Fréquences cumulées croissantes et décroissantes (colonnes 4 et 5).
    1             2                     3                    4                   5                  6                7
Prix
Fréquences
Question
1
Fréquences
Question
2
Cumulés croissants Question 1
Cumulés croissants Question 2
% de non-acheteurs
% d’acheteurs
100
0
15
0
100
100
0
110
6
20
6
85
91
9
120
4
30
10
65
75
25
130
45
20
55
35
90
10
140
25
15
80
15
95
5
150
20
0
100
0
100
0


         Explication des colonnes 2 et 4 : vendu à 100 dh, le produit n’est considéré trop cher par personne ; à 110 dh en revanche, 6 % n’achètent plus. Le prix de 120 dh
décourage 4 % supplémentaires. Si l’on vend à 120 dh on aura donc comme non acheteurs : les 4 % qui décrochent à 120 dh et, bien entendu, les 6 % qui déjà ne voulaient pas dépenser plus que 110 dh soit un total de 10 % de personnes qui n’achèteront pas. En suivant le même raisonnement, on cumule les non-acheteurs jusqu’au bas de la colonne 4 et, finalement, 150 dh découragerait toute la cible.

Explication des colonnes 3 et 5 : il faut suivre le même raisonnement mais en partant du bas de la colonne 3. 150 dh est un prix rassurant pour tout le monde : aucune personne ne refuse l’achat de crainte d’obtenir un bien de mauvaise qualité. A la ligne au-dessus, le tarif de 140 dh est déjà trop faible pour quinze personnes sur cent. A 130 dh, 20 % de consommateurs en plus estiment que la qualité ne sera pas rendez-vous. Pour ce prix, il y a les 15 % qui n’étaient pas intéressés en dessous de 140 dh plus les 20 % qui viennent de décrocher, ce qui fait un total de 35 % de non-acheteurs. On va donc cumuler ces non-acheteurs en remontant la colonne 5 : pour 100 dh il ne restera aucun client intéressé.

Explication des colonnes 6 et 7 :
         La colonne 4 donne le pourcentage de consommateurs qui veulent dépenser moins que le tarif proposé, la colonne 5 le pourcentage de ceux qui exige un prix plus élevé. Il ne s’agit donc pas des mêmes personnes. Pour certains c’est trop cher, pour les autres pas assez. Mais ils ont en commun de ne pas acheter : si on les additionne, on aura le pourcentage des non-acheteurs (colonne 6).
Pour 120 dh : 10 % « trop cher » + 65 % «  pas assez cher » = 75 % de non-acheteurs.
Soit : 100 % - 75 % = 25 % de clients potentiels (colonne 7).

Etape 4 : Le prix d’acceptabilité est le prix correspondant au plus fort pourcentage de la colonne des acheteurs. Ici 120dh pour 25 % d’acheteurs.
         Cette méthode présente plusieurs types de limites :
- les personnes interrogées ne sont pas en situation d’achat ;
- le produit est présenté seul, il n’est pas en situation de concurrence ;
- l’échantillon doit être représentatif ;
- les résultats ne sont valables qu’au moment de l’enquête ;
- surtout, le prix d’acceptabilité ne maximise que le nombre d’acheteurs, il ne procure pas forcément le meilleur chiffre d’affaires ou la plus forte marge. Il correspond à un objectif d’accroissement de la part de marché. Ce n’est donc pas forcément le meilleur prix puisqu’il peut très bien être insuffisant pour couvrir les coûts.
         Cette méthode est donc utilisable principalement pour les produits de grande consommation pour lesquels le prix est un élément déterminant de la décision d’achat du consommateur.
C- La fixation des prix en fonction de la concurrence :
         Cette méthode de fixation des prix consiste à prendre en considération la concurrence : l’entreprise décide alors de vendre plus cher, moins cher ou au même prix que son concurrent principal.
         Dans les oligopoles (produits électroménagers par exemple), les concurrences évitent en général de se battre sur les prix (politique d’alignement). Les entreprises en position de faiblesse choisissent souvent de s’aligner sur le leader afin d’éviter des mesures de rétorsion.
         Une autre possibilité est d’essayer de déterminer un écart de prix optimal par rapport aux concurrents, compte tenu des caractéristiques des produits et de la position occupée sur le marché.
         Cette pratique est assez répandue mais il faut toujours se méfier des risques liés à une guerre des prix. D’abord, toute modification de prix est immédiatement visible par les concurrents, qui peuvent rapidement se sentir agressés et réagir (d’où un avantage limité). Ensuite, une hausse ou baisse de prix doit être radicale pour être remarquée par le consommateur. Dans tous les cas, une guerre des prix élimine les plus faibles, coûte très cher aux plus forts et ne profite qu’aux distributeurs et aux consommateurs. D’où les réticences des producteurs à utiliser cette arme. Ils utilisent beaucoup plus souvent les conditions exceptionnelles (remises) et les promotions qui ont l’avantage d’être des réductions temporaires.

D- Une méthode globale de fixation des prix :
         Les trois méthodes précédentes ne doivent généralement pas être utilisées indépendamment. Une démarche globale peut être proposée. Elle comporte six étapes :

A NOTER  * Les prix non arrondis, parfois nommés prix psychologiques, sont des prix que l’entreprise a réduit légèrement en dessous d’un prix rond. L’idée est que le consommateur va être davantage attiré par un prix à 19,99 dh qu’à 20 dh car il est censé se dire qu’il s’agit de 10 dh et quelques… En réalité, aucune étude ne valide réellement la pertinence de ces prix non arrondis : il s’agit plutôt d’indiquer une promotion ou de se différencier de la concurrence.
3) Les stratégies de prix :
         Le prix est une variable d’autant plus stratégique que les consommateurs y sont de plus en plus sensibles. La politique de prix n’est donc qu’un moyen pour atteindre les objectifs généraux de la stratégie marketing : objectif de volume, de rentabilité ou d’image, mais aussi objectifs de gamme.

A- La stratégie de pénétration :
Cette stratégie consiste à adopter pour le produit considéré un prix relativement bas, ne dégageant qu’une marge unitaire faible. L’objectif est de toucher beaucoup de consommateurs et donc de vendre des quantités importantes.
Cette stratégie s’applique principalement lors du lancement d’un produit mais aussi dans les phases ultérieures de son cycle de vie (en phase de maturité sur des marchés très concurrentiels où règne une concurrence pour les parts de marché par exemple).
Elle se justifie lorsque :
- l’entreprise pense que l’élasticité de la demande par rapport au prix est forte (par exemple le marché des pâtes alimentaires) ;
- une forte augmentation de la production permet de diminuer le coût de revient unitaire ;
- l’entreprise souhaite empêche des concurrents potentiels de pénétrer sur le marché.

B- La stratégie d’écrémage :
         Une stratégie d’écrémage consiste à adopter pour le produit considéré un prix relativement élevé permettant une marge unitaire forte. L’objectif est le plus souvent de maximiser à court terme la rentabilité d’un produit nouveau.
         Cette stratégie se justifie lorsque le produit nouveau propose une innovation permettant une forte différenciation par rapport à la concurrence. Un prix élevé correspondra alors à la différence de valeur perçue par le consommateur entre où la demande est généralement peu élastique au début de la vie d’un produit radicalement nouveau : en effet, le consommateur ne peut comparer le produit à des concurrents qui n’existent pas encore.
         Il s’agit aussi d’une stratégie adoptée par des entreprises fabriquant des produits de luxe, dont le prix élevé est souvent davantage une motivation qu’un obstacle à l’achat. L’objectif est alors la rentabilité mais aussi l’image : le prix illustre le positionnement haut de gamme du produit.

C- La stratégie de prix différenciés :
         Une stratégie de prix différenciés consiste à adopter des prix plutôt bas pour certaines catégories de clients à conquérir ou certaines zones mal couvertes, et des prix plutôt élevés ailleurs. L’objectif est de toucher à la fois les segments les plus rentables de la clientèle et les autres, en différenciant par exemple les canaux de distribution ou les moyens de communication.
Cette politique s’applique aussi, sous le nom de yield management, à certaines entreprises de services. Il s’agit alors d’adopter une politique de prix flexibles en fonction de la demande, certains clients payant le même service beaucoup plus cher que d’autres (exemple : transport aérien). Cette stratégie se justifie si l’entreprise dispose de capacités de production inutilisées dont l’absence de vente conduit à une perte irrémédiable (par exemple des sièges d’avion ou de train, des chambres d’hôtels ou des séjours de vacances, toute unité invendue étant définitivement perdue).

D- La stratégie d’alignement :
         Il s’agit simplement de s’aligner sur la concurrence, l’entreprise vendant au même prix que son concurrent principal.

4 – La gestion stratégique des prix d’une gamme :
         Une entreprise doit définir de nombreux prix en même temps. Comme lors de la fixation du prix d’un produit seul, la gestion stratégique des prix d’une gamme doit tenir compte simultanément des coûts, de la clientèle et des prix des concurrents.
         La fixation du prix d’un produit ne peut être faite indépendamment de la gamme à laquelle il appartient, l’objectif étant alors de maximiser les bénéfices de toute la gamme. Si le positionnement en termes de prix entre deux produits de la même gamme est trop proche, la demande se reportera inévitablement sur le modèle ayant le meilleur avantage concurrentiel : c’est ce que l’on appelle la cannibalisation entre deux produits et c’est ce que l’entreprise essaie souvent d’éviter, même si la cannibalisation est parfois volontaire.
         Concrètement, l’entreprise met souvent en place un système servant à distinguer plusieurs niveaux de qualité, et donc plusieurs niveaux de prix : entrée de gamme, milieu de gamme, haut de gamme (exemple : nombre d’étoiles des hôtels).
- les produits liés : il s’agit de produits dont le fonctionnement nécessité l’achat d’autres produits (par exemple imprimantes et cartouches d’encre, jouet et pile électrique…). Le prix du produit principal est alors souvent réduit mais le prix des accessoires comprend lui une marge élevée ;
- les sous-produits : des sous-produits peuvent apparaître lors de la production d’un produit principal (par exemple la découpe de produits de boucherie peut donner lieu à des sous-produits comme la nourriture pour animaux). Il est alors intéressant d’essayer de les vendre à un prix qui couvre au moins les coûts qui leurs sont directement imputables ;
- les prix par lots : les produits d’une même gamme peuvent être commercialisés ensemble ce qui permet de fixer un prix global attirant. L’objectif est alors d’effectuer des ventes additionnelles, certains consommateurs achetant le lot alors qu’ils n’auraient pas acheté tous les produits qui le composent.
5- La politique de modification de prix
         En pratique, l’entreprise a besoin de modifier ses prix relativement souvent, soit pour satisfaire le consommateur (répercussion d’une baisse des coûts, demande du consommateur), soit en réaction aux pratiques des concurrents.

A-  Les réductions de prix :
Les prix sont publiés dans ce que l’on appelle un tarif : on publie alors le prix catalogue, valable pendant une durée déterminée. Cependant, cela n’interdit pas au vendeur de consentir des réductions s’il souhaite accorder un avantage à son client. On distingue d’un côté les rabais, remises et ristournes, et de l’autre les prix promotionnels.

1) Les rabais, remises et ristournes :
         Le rabais est une diminution spontanée ou négociée sur le prix proposé ou facturé. Il est appliqué sur des articles présentant un défaut ou demeurés longtemps en stock (cas des soldes). Les entreprises peuvent aussi accorder de rabais, appelés escomptes, aux clients qui payent au comptant.
         Les remises sont des réductions de prix consenties pour des volumes d’achats importants ou en raison de la fidélité du client. Elles ont donc pour but d’inciter l’acheteur à concentrer ses achats sur un même fournisseur.
         Une ristourne est une réduction de prix déterminée selon le montant annuel du chiffre d’affaires réalisé avec l’acheteur. En général, la somme lui est remboursée en fin d’année, mais la contrepartie peut également prendre la forme d’un service rendu par le vendeur.
A NOTER  * La circulaire du 16 mai 2003 relative à la négociation commerciale entre fournisseurs et distributeurs précise que : «  le montant et les modalités selon lesquels tout acheteur peut bénéficier de réductions de prix, qu’il s’agisse de rabais, de remises ou de ristournes, ainsi que les conditions dans lesquelles elles sont consenties doivent figurer dans les conditions générales de vente ».
2) Les prix promotionnels :
         Une entreprise peut, temporairement, décider de diminuer ses prix. Il s’agit alors de prix promotionnels qui sont des différentes natures :
- les distributeurs proposent constamment des promotions sur les grandes marques dans le but d’attirer des clients qui achèteront aussi d’autres produits au prix normal ;
- les producteurs proposent des offres spéciales afin de soutenir un nouveau produit ou un nouveau packaging par exemple ;

- ces mêmes producteurs proposent des offres de remboursement pour faciliter l’écoulement d’un produit. L’avantage de cette pratique est qu’elle est moins coûteuse qu’une réduction directe du prix puisque de nombreux clients n’utilisent pas leur droit à remboursement.
         Le principal risque de ces pratiques est l’imitation, ou même la surenchère, par les concurrents, conduisant à une guerre  des prix.

B- Les modulations de prix :
         En pratique, il est fréquent qu’une entreprise soit amenée à vendre un même produit à des prix différents à différents clients : c’est ce que l’on appelle la discrimination par les prix. Cette modulation du prix est autorisée à condition que les avantages de prix consentis à certains clients ne soient pas abusivement discriminatoires.
         Le prix demandé à chaque client peut naturellement varier en fonction des volumes achetés. Cependant, des formes de discrimination par les prix plus subtiles existent :
- une discrimination entre les clients signifie que certains clients payent un prix moins élevé pour un même produit ou service (par exemple les cinémas ont des tarifs étudiants) ;
- la discrimination d’image consiste à commercialiser un même produit sous des marques et à des prix différents ;
- la discrimination selon le réseau de distribution consiste à adopter un prix différent pour un même produit selon qu’il est acheté par tel ou tel type de distributeur ;
- la discrimination selon le lieu consiste à faire payer un prix différent selon le lieu auquel on se trouve (par exemple les sièges à l’opéra ont tous le même coût et sont pourtant proposés à des prix très différents) ;
- enfin, le yield management consiste à mixer l’ensemble de ces discriminations afin d’optimiser la rentabilité.

C – Les initiatives et les réactions aux modifications de prix :
         L’entreprise peut décider de son propre chef de modifier ses prix, à la hausse ou à la baisse. Elle doit aussi être prête  à réagir aux modifications de prix des concurrents :
-         L’initiative d’une baisse des prix peut résulter de plusieurs événements :
·        une capacité de production excédentaire : l’entreprise a besoin d’augmenter son volume de vente et ne peut l’obtenir que par une baisse des prix si les autres solutions ont échoué,
·        une baisse de part de marché (due à un nouvel entrant par exemple),
·        afin de répercuter des baisses de coûts : le but est louable (faire profiter le consommateur de la baisse des coûts), mais la stratégie risquée (en termes d’image et en termes financiers) ;
-         L’initiative d’une baisse des prix peut résulter :
·        de la volonté de répercuter une hausse des coûts pour éviter une baisse de rentabilité,
·        de la volonté de réagir à un excès de demande (si l’entreprise ne peut la satisfaire).
Une hausse des prix, si elle est acceptée par les consommateurs (demande inchangée), est extrêmement rémunératrice.

 

Exemple :
         Une entreprise vend à 3 dh des glaces. En juin elle en vend 2 000 unités qui lui ont coûté 5 400 dh. Le bénéfice est donc de 600 dh, soit 10 % du chiffre d’affaires. En augmentant son prix de 15 centimes (5 % d’augmentation), et pour une demande inchangée, le bénéfice passe à 900 dh, soit une augmentation de 50 % !
        
Dans tous les cas, il faut être capable d’anticiper les réactions des clients et des concurrents à ces hausses ou à ces baisses de prix :
- les clients peuvent mal interpréter ces modifications : une baisse de prix peut vouloir dire baisse de la qualité, entreprise mal en point financièrement, produit qui se vend mal ; à l’inverse, une hausse de prix peut vouloir dire que le produit est très demandé et qu’il faut l’acheter tout de suite au risque de ne plus le trouver ;
- la réaction des concurrents est d’autant plus forte qu’ils sont peu nombreux. Elle dépend aussi de son interprétation : l’entreprise essaie de s’approprier son marché, elle est en difficulté, elle cherche à diminuer les prix de l’ensemble du secteur…
        
A l’inverse, l’entreprise doit aussi être prête à réagir à toute modification de prix de ses concurrents. Elle dispose de plusieurs possibilités en cas de baisse :
- s’aligner ;
- maintenir ses prix ;
- réduire ses prix davantage que le concurrent ;
- augmenter les prix en contre-attaquant sur le produit ;
- lancer un nouveau produit moins cher.

         Finalement, toute décision, qui doit parfois être très rapide, dépend de l’élasticité de la demande au prix du secteur, de l’étape du produit dans son cycle de vie, de son importance stratégique pour l’entreprise et des capacités de production.

Chapitre : La politique de prix Chapitre   : La politique de prix Reviewed by IstaOfppt on 07:00 Rating: 5

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